Une euro-obligation est une obligation libellée en Euro qui serait émise au nom de l’Union Européenne et non plus des gouvernements nationaux.
Si la distinction est très récente et peu utilisée, il ne faut pas confondre les Euro-obligations avec la définition “financière” d’eurobond qui désigne simplement l’ensemble des obligations émises dans des devises différentes de celle du pays d’origine.
Cette distinction peu connue ou peu usitée reste importante car son absence de compréhension permet de cacher derrière une réalité assez banale et d’abord technique : l’obligation et l’appel au marché pour financer une dette, un instrument quasi analogue qui induit mécaniquement une réalité politique : l’avènement d’un super Etat Européen.
I. Différences entre euro-obligation et Eurobonds
A. L’euro-obligation
Une « euro-obligation » est un titre financier : c’est un titre de créance. Il s’agit d’une reconnaissance de dette. Le titre par émis par et au nom de l’Union Européenne et non plus des gouvernements nationaux pour financer la dette de l’ensemble des Etats membres. C’est donc un emprunt émis en commun par les pays de la zone euro sur les marchés. La forme juridique de cet emprunt est nommée obligation.
Ce fut initialement l’une des solutions avancées pour lutter contre la crise de la dette en Europe. Les initiateurs furent Juncker et Delors. Elle provient des partisans d’une Europe plus fédérale et son crée pour être au service de cette finalité politique.
Les euro-obligations et E-Bonds ont beaucoup de points communs notamment le mot « bonds » qui signifie obligations en anglais. Mais les réalités politiques sous-jacentes sont différentes. Les outils ne sont pas neutres.
B. L’euro bonds
Aujourd’hui, pour financer leurs déficits, chaque État de la zone euro peut émettre des obligations (titres de dette auxquels peuvent souscrire des investisseurs privés ou publics) libellées en euros mais avec des garanties nationales.
Ainsi distinguons Euro-obligations et Eurobonds. L’Euro-obligation de doit pas être confondue avec la définition “financière” d’eurobond qui désigne uniquement les obligations émises dans des devises différentes de celle du pays d’origine !
L’eurobond est une obligation classique qui permet aux États ou aux entreprises d’emprunter dans une autre devise que celle du pays émetteur. Contrairement à ce que peut suggérer leurs noms, les eurobonds sont principalement libellés en dollars. Ce sont de simples outils de gestion de la dette privée ou publique.
On les distingue aussi des deux autres catégories classiques d’obligations que sont les obligations domestiques émises en monnaie locale et les obligations internationales émises en devises.
II. Points communs entre eurobonds et Euro-obligations
A. Une technicité semblable
Actuellement, et dans le cas de l’UE, chaque pays, ou entreprises endettées empruntent de son côté quand il a besoin de lever des fonds. Cette créance est appelée Obligation. Son détenteur (l’acheteur) possède donc une créance sur un débiteur : le vendeur, émetteur d’obligation qui est en l’occurrence l’Etat. Emetteur « obligé » de payer à un terme prévu à l’avance, un intérêt défini à l’avance et devra rembourser le capital prêté à un terme également défini au contrat. Pour inciter les investisseurs à acheter ce type de titre financier, un taux d’intérêt leur est versé. Ce taux varie en fonction de la perception par le marché financier de la capacité de l’émetteur à rembourser la dette.
La capacité à rembourser dépend de la santé économique du pays (ou de l’entreprise) en question. Le niveau de sa dette sera regardé avec attention. Un acteur très endetté à une plus forte probabilité de ne pas rembourser qu’une personne peu endettée. Cette réalité façonne le niveau des taux d’intérêt prêt à être payé par l’investisseur. Plus la dette est grande plus la méfiance est grande et plus la rémunération de l’argent prêté (le taux d’intérêt) devra être majoré d’une une prime de risque compensant la menace de non remboursement.
C’est la raison pour laquelle les pays qui ont une dette peu élevée et de nombreuses ressources pour la rembourser bénéficieront d’un taux d’intérêt moins haut que les pays qui ont une forte dette et peu de ressources. C’est le cercle vertueux de la croissance.
A titre d’exemple, l’Allemagne a pu emprunter, en septembre 2024 de la dette à 10 ans au taux de 2.18%. La France fait face à un taux de 2,94%, le coût de l’emprunt coute quasiment 30% plus cher pour un Français que pour un allemand. L’Italie à un taux de plus de 3.52% et la Suisse à 0,47%… Cqfd !
Cette logique économique est valable quel que soit le type de « bonds ».
B. Spécificité des Euro obligations
Ici nous sommes au cœur d’un projet politique induit, selon la méthode Monnet, par des considérations techniques.
- Les Euro-obligations seraient donc émises au niveau européen en leur nom commun, et non plus au niveau des pays, et cela avec un taux d’intérêt unique. Taux qui serait une moyenne de ceux auxquels les différents pays membres se financent. Concrètement, les euro -obligations consistent à mutualiser, à l’échelle européenne, la dette des pays de la zone euro. Ils seraient gérés par le Fonds Européen de Stabilité Financière qui fut créé en 2010 pour des premières opérations peu complexes de refinancement de certaines dettes.
Aux yeux des partisans d’un Etat Européen, ce projet aurait l’avantage politiquement de tenir, par la finance, par les dettes des pays : les économies nationales. Et techniquement d’offrir l’avantage de rassurer les investisseurs en mutualisant les dettes. Ceci créant un contexte financier plus stable qui viserait à empêcher la spéculation contre les pays mal gérés.
Ces euro-obligations entraîneraient une plus grande intégration au sein de la zone euro et la dette des pays mutualisée donnerait une bouffée d’air aux pays en difficultés qui peinent à se refinancer en raison des taux élevés auxquels ils sont soumis. C’est le cas de la France, Grèce, Espagne, Italie, et Portugal). Ils pourraient ainsi entreprendre de combler leurs passifs et rembourser leurs créanciers.
Si les eurobonds ne posent pas de problèmes politique ou technique a priori, ce n’est pas le cas des Euro Obligations. Les inconvénients sont nombreux ce qui et explique la réticence des pays aux finances publiques bien gérées.
Politiquement, le projet répond à une volonté d’intégration totale des Etats dans l’UE. La France deviendrait une simple région d’un empire. L’Euro Obligation obligera mécaniquement les pays à avoir les mêmes politiques budgétaires donc plus aucune liberté de décision au niveau des politiques économiques pour chaque Etat. C’est assurément la suppression, via les endettements – voulu ou subit-, de la souveraineté de chaque nation.
Techniquement. Pour certains, le principal Inconvénients des euro-obligations est qu’ils augmentent le taux d’intérêt payés par les États qui inspirent le plus confiance aux investisseurs et qui obtiennent par les eurobonds des taux d’intérêts plus bas. Donc une diminution de leur capacité à investir. Mathématiquement, les pays qui bénéficient déjà de la confiance des investisseurs (comme l’Allemagne) et qui ont des taux peu élevés verraient le coût de leur emprunt augmenter. Ce phénomène explique que les pays les plus rigoureux sont relativement peu ouverts au principe des euro obligations. Je le rappelle ces pays pouvaient émettre individuellement des eurobonds
L’inconvénient de l’Euro obligation est d’autant plus vrai qu’il comporte également le risque d’inciter les pays en difficultés à s’endetter encore plus. Les États peuvent profiter de la baisse de leurs taux d’intérêt, généré par les bons élèves de la classe, pour emprunter à outrance et de manière irresponsable. Il est vrai que la création d’Euro Obligations, n’évitera pas, à priori, l’augmentation mécanique de l’endettement des États… mais sans principe d’autorité forte, donc d’un centralisme renforcé, le risque subsistera.
Dans le cas d’un Etat émettant des obligations ordinaires pour couvrir une dette nationale croissante, le cout croit ou croitra parallèlement. Le paiement des intérêts et le remboursement des emprunts arrivés à échéance, deviendra exorbitant. Le cas Français le montre. C’est le retour obligé au réel. La contrainte financière oblige le pays à limiter l’expansion de cette dette. Tout ceci est souvent ignoré car tout allait de soi avant la monnaie unique. La question se posait différemment. Un pays mal géré, endetté, voyait immédiatement les investisseurs fuir la monnaie dont le cours fondait. Le pays s’appauvrissait au regard de l’étranger. Le bon sens redevenait légitime face aux utopies qui souvent gêneraient l’endettement non productif. La sanction était immédiate donc pédagogique. Dans le cas d’une monnaie unique, la discipline budgétaire est inhérente et obligatoire dans chaque pays membre. Le pays profiteur, le mauvais gestionnaire, le passager clandestin profitera des taux d’intérêts bas, d’une monnaie stable mais finira par laisser l’inflation s’installer. Avec la monnaie forte, la compétitivité chutera et il devra acheter la paix sociale en la financer par l’endettement. Il demandera à l’union de fournir l’effort. L’Union imposera son impérium ! Le nouveau centre jacobin ainsi constitué ne lâchera pas. La Grèce en a fait l’expérience. Elle est sortie de sa dernière crise en diminuant les revenus de 30 %. Rien ne se crée tout se transforme…
Ainsi, d’autres ne sont pas favorables au système des euro Obligations parce qu’ils considèrent que la concurrence sur les taux d’intérêt fait partie des garanties de stabilité du marché financier.
En conclusion,
C’est en 2012, qu’un premier outil obligataire de ce genre fut mis sur la table des Européens. Les « Project bonds » furent initiés par le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso. Il fut à l’origine de ce qui aurait pu marquer un compromis avec l’Allemagne.
Il s’agissait aussi d’emprunts, type eurobonds mais lancés en commun par plusieurs pays européens dans le seul but de financer des grands projets d’infrastructures. Ceci, afin de stimuler les investissements. Cette finalité était alléchante tant il est vrai que l’urgence est à l’investissement créateur d’emplois en non plus aux dépenses sociales ou de fonctionnement.
Mais, le nouveau projet des Euro-obligations n’est pas essentiellement de cette nature. Il cache, derrière l’argument d’un grand plan d’investissement européen, l’abandon des souverainetés et la naissance de l’Etat synarchique Européen.
Les vraies questions sont occultées. Quelle sera la répartition par pays de la charge du remboursement, quid de la destination des investissements, le financement de la reconstruction de l’Ukraine ? et surtout nous ne voyons pas pourquoi, les pays qui n’ont pas su investir avec prudence et audace vont subitement : le savoir et le vouloir ?
Une fois de plus, nous posons les questions des techniques qui cachent des politiques, des libertés détruites, des responsabilités chassées et de la subsidiarité inversée. Terminons par une question de bon sens dans un monde complexe : Pour obtenir l’optimum « économique, vaut-il mieux un acteur qui prends 27 décisions ou vingt-sept acteurs qui prennent chacun une décision ?
Merci !
L’article est déverouillé. Bonne lecture !